Depuis le samedi 13 juillet, Kara, une ville située à 420 km au nord de Lomé, devient le centre névralgique du Togo. Les autorités politiques, chefs traditionnels, directeurs de sociétés et cadres du pays convergent vers cette ville pour assister aux luttes Evala, un rite initiatique du peuple kabyè marquant le passage à l’âge adulte chez les garçons. Mais cette période de célébration, loin d’être uniquement traditionnelle, est aussi marquée par des excès et des vices qui préoccupent.
La période d’Evala attire désormais des foules venues de diverses régions du pays, voire de l’extérieur du pays. Cette affluence massive donne lieu à une prolifération de comportements déviants : homosexualité, prostitution, consommation excessive de drogues et d’alcool, augmentant ainsi la vulnérabilité de la ville à la propagation du VIH/SIDA et autres maladies.
Kara est une ville qui n’échappe pas au critère de pauvreté à l’instar de plusieurs villes du pays. La misère est palpable par endroit, avec en toile de fond une bonne partie de la population ne dépendant que du salariat. Pour la jeunesse et même pour certaines femmes mariées, la période des Evala est une occasion de profiter des largesses des élites politiques et économiques présentes pour les festivités. Ces jeunes et ces femmes voient dans ces visiteurs une opportunité de goûter à un luxe temporaire : chambres d’hôtel climatisées, repas copieux, plaisirs sexuels de tout genre et gains financiers non négligeables.
A en croire le confrère IciLomé, la pratique de l’homosexualité semble particulièrement lucrative pendant cette période, surpassant même la prostitution féminine en termes de rentabilité. Les étudiants, privés d’allocations universitaires pendant les vacances, profitent également de cette période pour se constituer un pécule en vue de la rentrée.
Les témoignages recueillis révèlent une réalité sombre.
Une étudiante confie à Togoweb : « C’est le moment pour moi de me ravitailler pour les vacances puisque nos aides à l’université sont coupées… et puis vous savez, c’est le moment pour moi de dormir à l’hôtel, manger un peu de brochettes et prendre Awooyo (une bière locale). »
Les conséquences de ces festivités débridées sont souvent dramatiques : grossesses non désirées, foyers brisés et une population toujours plus dépendante des aides temporaires et des opportunités précaires offertes par cette période. Cependant, malgré les effets néfastes évidents, l’attrait des Evala reste fort, et la perspective d’une nouvelle “moisson” l’année suivante est attendue avec impatience. A croire qu’ils ou qu’elles s’y plaisent.
Pour le confrère IciLomé, les dirigeants et décideurs, bien qu’au fait de ces réalités, semblent ignorer ces problèmes, préférant profiter des festivités plutôt que d’y apporter des solutions durables.
En bref, les Evala, au-delà de leur valeur culturelle, exposent cruellement les failles socio-économiques de la région de Kara. Pour que cette fête retrouve sa pureté traditionnelle et cesse d’être synonyme de débauche et de misère, il est impératif que des mesures concrètes soient prises pour améliorer les conditions de vie des habitants de Kara, d’une part que des restrictions soient mises en place pour éviter certains comportements pouvant mener à la légèreté des mœurs.