Face aux vives réactions suscitées par les arrestations intervenues dans la nuit du 5 au 6 juin 2025 à Lomé, le parquet du Tribunal de grande instance s’est enfin exprimé ce 9 juin à travers un communiqué officiel. Une sortie qui vise à apporter des éclaircissements sur le contexte des interpellations et les suites judiciaires réservées aux personnes arrêtées, dans un climat national de tension marqué par les contestations contre la révision constitutionnelle d’avril 2024.
Selon le procureur de la République, les événements qui ont émaillé ces deux journées sont qualifiés de « manifestations illégales » organisées en réponse à un appel lancé depuis l’étranger. Le communiqué évoque « un groupe de concitoyens » basés hors du Togo qui aurait élaboré un « plan de déstabilisation » des institutions, appelant à des actions de protestation le 6 juin. Dans cette dynamique, des jeunes, répondant à ces appels circulant notamment sur les réseaux sociaux, auraient occupé bruyamment la voie publique dès la nuit du 5 juin à Lomé, érigeant des barricades, bloquant la circulation, et utilisant des objets de fortune, dont des casseroles, pour créer des vacarmes dans plusieurs quartiers de la capitale.
Le vendredi 6 juin, la tension est montée d’un cran. Des regroupements ont été observés à divers endroits, avec de nouveaux blocages de route et, selon les autorités, des actes de violence dirigés contre les usagers de la voie publique. Le parquet évoque une situation de troubles aggravés à l’ordre public, en violation de la loi n° 2019-010 du 12 août 2019, qui encadre les manifestations pacifiques au Togo.
Face à la situation, les forces de l’ordre sont intervenues pour « maintenir l’ordre et protéger les usagers », ce qui a conduit à l’arrestation de plusieurs dizaines de manifestants. Parmi eux, selon le parquet, une majorité de Togolais, mais également « quelques étrangers, dont un Français résidant au Togo depuis quelques mois ». Les faits reprochés aux interpellés sont qualifiés de délits relevant des articles 495 et 496 du nouveau code pénal, relatifs aux troubles à l’ordre public.
Toutefois, après les premières auditions et au terme de l’enquête préliminaire, le ministère public indique avoir libéré une large partie des interpellés. « Face aux charges jugées légères à l’encontre de certaines d’entre elles, le Ministère public les a conséquemment remises en liberté », lit-on dans le communiqué. Pour d’autres, « un rappel à la loi » a été effectué avant leur libération, bien que des charges aient été retenues. Au total, 56 personnes ont ainsi été libérées ce 9 juin 2025.
Concernant les autres individus encore détenus, le parquet précise que leur garde à vue a été prolongée, conformément aux dispositions légales, en raison de la nécessité d’accomplir des actes d’enquête supplémentaires. Ces derniers seront, assure le procureur, présentés au parquet dans les heures suivantes.
Cette sortie du parquet intervient dans un contexte où des mouvements citoyens, à l’instar du front « Touche Pas à Ma Constitution », dénoncent depuis plusieurs jours des « arrestations arbitraires » et une « répression ciblée » contre des manifestants pacifiques. Des figures connues de la société civile, des étudiants, des professionnels, notamment le médecin Dr Hounou-Adossi Ayitévi Firmin, avaient été mentionnés parmi les interpellés. Ce dernier a d’ailleurs recouvré la liberté ce même 9 juin, à la suite d’une mobilisation symbolique du corps médical.