À Atakpamé, les chefs traditionnels mobilisés contre l’extrémisme et les tensions liées à la transhumance

Face aux menaces croissantes qui pèsent sur la stabilité du Togo, le ministère de l’administration territoriale, de la décentralisation et de la chefferie coutumière (MATDCC) a réuni ce mercredi 28 mai à Atakpamé les chefs traditionnels de la région des Plateaux-Est, dans le cadre d’un atelier stratégique. Organisée par la Direction de la Chefferie Traditionnelle (DCT) avec le soutien de l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM), cette rencontre marque la septième étape d’une série d’ateliers régionaux visant à renforcer le rôle des garants des us et coutumes dans la préservation de la paix.

Le préfet de l’Ogou, EKE Kodjo Noël, représentant le gouverneur de la région, a ouvert les travaux en dressant un tableau préoccupant de la situation sécuritaire.

Préfet de l’Ogou

« L’extrémisme violent gagne du terrain dans la sous-région, tandis que les tensions autour de la transhumance deviennent récurrentes. Ces deux phénomènes représentent une double menace que nous ne pouvons ignorer », a-t-il martelé. Il a insisté sur le fait que les mécanismes traditionnels de gestion des conflits, naguère efficaces, peinent aujourd’hui à contenir les dérives. « Leur dégradation aggrave considérablement la situation », a-t-il alerté.

Le Commissaire Divisionnaire Vondoly Kodjo, Directeur national de la Chefferie Traditionnelle, a, pour sa part, rappelé le rôle crucial des chefs traditionnels dans la médiation et la consolidation de la paix.

Commissaire divisionnaire Vondoly Kodjo

« Vous êtes le maillon fort de la cohésion sociale. Votre responsabilité dans la prévention des crises est plus que jamais essentielle », a-t-il souligné, appelant les leaders traditionnels à promouvoir un changement de mentalité au sein de leurs communautés.

Dans un contexte où les conflits liés à la transhumance refont surface chaque saison sèche, attisés par la pression foncière, les déplacements incontrôlés de troupeaux et les effets du changement climatique, la nécessité de doter les chefs de canton et autres autorités locales d’outils modernes de prévention est jugée urgente. C’est dans cette optique que l’OIM, bras opérationnel des Nations Unies pour les questions de migration et de mobilité humaine, soutient activement cette série de formations. Sa représentante à l’atelier, Mme Deborah Ankou, assistante principale au programme, a exprimé sa reconnaissance envers le gouvernement togolais pour son engagement en faveur de la cohésion sociale. « L’OIM est déterminée à accompagner le Togo dans ses efforts de prévention des conflits et de gestion pacifique de la transhumance », a-t-elle assuré, tout en rappelant que l’organisation intervient aussi bien sur les flux migratoires humains qu’animaux, à l’intérieur comme à l’extérieur des frontières.

Mme Débora Ankou, représentante de l’OIM

Mme Ankou a tenu à saluer les avancées réalisées grâce à la vision du chef de l’État, Faure Essozimna Gnassingbé. Une reconnaissance partagée par le directeur de la chefferie traditionnelle, qui a tenu à rendre hommage au Président pour avoir mis en place « toutes les conditions nécessaires à une paix durable et à la cohésion sociale au Togo ».

Présent à cette session, le Maire de la commune Ogou 4, M. GUEGUE Noumonvi, a également salué une « initiative salutaire » qui vient renforcer le dialogue entre communautés. Il a exhorté les chefs traditionnels et autres participants à s’investir pleinement dans les discussions et à capitaliser les acquis de la formation pour les traduire en actions concrètes dans leurs localités respectives.

Participants

Durant les travaux, les participants, chefs de canton, maires, préfets, ont pris part à deux communications clés. La première, sur la prévention de l’extrémisme violent au Togo, leur a permis d’acquérir des outils pratiques pour identifier les signaux faibles de radicalisation au sein des communautés. La seconde, axée sur la gestion pacifique de la transhumance, a mis en lumière des approches inclusives et des mécanismes de dialogue pouvant être adaptés à la réalité du terrain. Ces échanges ont été l’occasion de partager des expériences vécues, parfois douloureuses, mais aussi porteuses d’espoir. Des voix se sont élevées pour réclamer une révision en profondeur des textes réglementant la transhumance, jugés parfois inadaptés aux réalités actuelles.

Cette mobilisation locale s’inscrit dans un contexte régional tendu, alors que plusieurs pays voisins, comme le Burkina Faso et le Bénin, font face à une montée de la violence djihadiste et à une pression migratoire croissante sur leurs zones rurales. Le Togo, engagé dans une stratégie de prévention, mise sur ses relais communautaires traditionnels pour anticiper les crises. L’étape d’Atakpamé, qui sera suivie de celle d’Amlamé ce vendredi 30 mai, s’inscrit ainsi dans une dynamique nationale de renforcement des capacités des acteurs locaux.