Le Togo entre dans une ère de changement avec l’adoption d’une nouvelle constitution lors d’un vote historique dans la nuit de lundi à mardi. Cette réforme, approuvée par une majorité écrasante des députés, marque une transition significative vers un régime parlementaire. Sous la direction de Mme Yawa Djigbodi Tsègan, Présidente de l’Assemblée nationale, et en présence de M. Pacôme Yawovi Missiamé Amenyo Adjourouvi, ministre des droits de l’Homme, cette révision constitutionnelle vise à moderniser le paysage politique togolais et à répondre aux aspirations de la population.
La réforme constitutionnelle instaure plusieurs changements majeurs. Notamment, elle abolit l’élection présidentielle au suffrage universel, substituant le président de la République par un Président du conseil des ministres élu par l’Assemblée nationale. De plus, le Président du Conseil sera désigné pour un mandat de six ans en tant que chef du parti majoritaire après les élections législatives.
Cette réforme renforce le rôle de l’Assemblée nationale et du Sénat, accordant aux députés et aux sénateurs un pouvoir accru dans le processus politique. Le Président de la République sera désormais élu pour un mandat unique de six ans par l’Assemblée nationale et le Sénat en congrès, marquant ainsi un changement significatif dans le paysage politique togolais. En outre, la révision constitutionnelle comprend la création de la Haute Autorité pour la transparence et la lutte contre la corruption, ainsi que la réforme de la justice ordinaire et des autorités constitutionnelles indépendantes.
Régime parlementaire
Cette évolution vers un régime parlementaire vise à renforcer le contrôle des citoyens sur leurs dirigeants et à favoriser leur participation directe dans le processus politique. Elle reflète également l’engagement du gouvernement togolais à moderniser ses institutions et à promouvoir la transparence et la bonne gouvernance. La proposition de révision constitutionnelle a été initiée par un groupe de députés, conformément à l’article 144 de la Constitution, démontrant ainsi un engagement démocratique et inclusif dans le processus de réforme.
En somme, cette réforme constitutionnelle marque une étape importante dans l’histoire du Togo, ouvrant la voie à une gouvernance plus démocratique et participative, et témoignant de la volonté du pays de s’adapter aux évolutions sociopolitiques contemporaines.
L’opposition vent debout contre
Du côté de l’opposition, l’heure n’est pas propice pour s’apitoyer sur son sort mais avancer. Gerry Taama, président du Nouvel Engagement Togolais (NET), parti politique présent à l’Assemblée nationale, l’heure est au travail à la base afin d’obtenir un grand nombre de suffrage lors des législatives et peser lourdement lors des prochaines adoptions de textes.
“Le vote était au bulletin secret et chacun a voté selon sa conscience. Il faut donc accepter que 89 députés sont favorables à cette nouvelle constitution et désormais, elle devient la nôtre à nous tous. J’aurai aimé présenter un résultat différent mais ceux qui me connaissent savent que je ne suis pas du genre à m’apitoyer sur mon sort. Ce qui s’est passé s’est passé. Il faut à présent s’organiser pour aller vers les électeurs et les convaincre de donner aux députés du Net les voix nécessaires pour peser au sein de la prochaine assemblée nationale” a écrit Gerry Taama.
Pour ce dernier, ce texte n’est pas opportun et il avait donné des raisons pour lesquelles son parti ne voterait pas pour l’adoption de ce texte. Parmi ses raisons, l’une d’elle stipulait qu’une nouvelle République ne peut être initiée par un petit groupe de députés.
“Si nous devons aller à une cinquième république, son urgence, sa pertinence, sa forme et le régime politique à lui applicable doivent faire l’objet d’une large consultation, impliquant toutes les couches de notre société : les acteurs politiques, la société civile, les universitaires, les religieux, les chefs traditionnels, le monde des affaires, les syndicats, la paysannerie, les corps constitués, l’administration, les jeunes… tout ce monde devrait pouvoir se prononcer sur le modèle de société que nous souhaitons avoir pour notre pays. Depuis 2021, les acteurs politiques organisent régulièrement des dialogues (CNAP, CPC) où le débat sur la nécessité d’une nouvelle République n’a jamais été évoqué” a souligné le parlementaire.
Il n’est pas le seul que cette nouvelle révision constitutionnelle n’enchante pas. La quasi totalité de l’opposition togolaise est vent debout contre cette réforme. Me Dodji Apevon en prélude même à l’adoption de ce texte avait alerté les togolais.
« A l’analyse de l’exposé des motifs et de la nouvelle proposition de loi constitutionnelle, on se rend aisément compte que les auteurs de cette folle, sordide, cruelle et vile manœuvre sont plutôt guidés par le souci de garantir un pouvoir à vie à une seule famille, mieux à un seul individu, ceci au détriment des aspirations profondes du peuple togolais et de la stabilité du pays. (…) En tout état de cause, l’adoption d’une nouvelle constitution qui engage l’avenir de notre pays est une question tellement grave qui ne peut être laissée à la merci de quelques individus, fussent-ils des députés et de surcroit des députés qui ont fini leur mandat », a indiqué Me Dodji Apevon.
Pour l’instant, cette réforme doit être promulguée par le Président de la République avant son entrée en vigueur. Mais ce texte peut être rejeter soit par le Président de la République, soit par la Cour Constitutionnelle.