Beaucoup se réserveraient le droit de tenir en piètre estime la diplomatie togolaise à l’échelle internationale vu la petitesse de son territoire et de son marché intérieur. Mais l’évidence nous révèle le contraire au regard de la place que le Togo s’offre dans le concert des nations, de par son option à pratiquer une diplomatie neutre et pacifique.
Un tel choix lui vaut à bien des égards ce que nous pouvons appeler des succès diplomatiques, aussi bien dans la résolution des conflits que dans sa capacité à mettre son expertise en matière de paix, au service des transitions en cours sur le continent. Face au monde multipolaire en construction, le multipartenariat devient son deuxième choix afin d’accroître ses possibilités d’agir au mieux dans un monde de plus en plus mutant et dynamique. Ses choix et stratégies ne sont pas des moindres aux yeux de certaines puissances qui n’hésitent pas à nouer des relations bilatérales avec le Togo pour le bien des peuples au service desquels ils se trouvent et dont ils sont responsables.
De la ceinture de Taïkondo à Séoul à la décoration à Bamako en passant par le parapluie de Paris, l’on peut se mettre en confiance que la diplomatie togolaise se porte au mieux. À la vue de toutes ces images, tout le monde est allé de son commentaire, aussi bien subjectif qu’objectif. Sans toutefois vouloir s’attarder sur lesdits commentaires, le présent article se propose de porter un regard d’un journaliste critique sur la neutralité pragmatique de la diplomatie togolaise, qui visiblement semble avoir une influence qui ne laisse nul indifférent, quel que soit ce qu’on peut bien lui reprocher.
Cette diplomatie, il faut l’avouer, s’est beaucoup plus illustrée dans l’affaire des 49 soldats ivoiriens, arrêtés pour des raisons de mercenariat au Mali. Son attrait ne saurait laisser les puissances qui désirent coopérer avec elle pour deux raisons : la première c’est le choix de demeurer politiquement neutre vis-à-vis des tensions mondiales et de ne rechercher que la paix là où celle-ci est menacée et la seconde c’est de se donner toutes les possibilités de porter haut sa voix pour défendre les intérêts non seulement de la nation togolaise, mais aussi ceux de l’Afrique tout entière. L’on pourrait penser que c’est une diplomatie dynamique.
Aussi complexe que soit la géopolitique, celle togolaise se saisit de l’intérieur justement par sa neutralité pragmatique vis-à-vis des positions des uns et des autres sur des questions d’ordre géopolitique international. Est-ce par mesure de prudence géopolitique ou géostratégique ? Est-ce encore par souci purement politique en vue de préserver les intérêts du peuple togolais ? Est-ce enfin par volonté de consolidation des liens économiques avec le monde extérieur ? Certainement oui pour une raison ou pour une autre, la diplomatie togolaise fonctionne selon ses visées et ses orientations politiques, tout comme toute diplomatie d’ailleurs. Dit autrement, le propre de toute diplomatie consiste justement à appliquer dans les relations internationales, ce que l’on peut appeler la diplomatie des intérêts.
La diplomatie des principes, étant le plus souvent reléguée au second plan, donne alors libre court à la pratique de celle des intérêts. Car, le propre de l’action politique d’un État, étant l’extension de son territoire et la conquête d’autres territoires, par la force ou la ruse, il convient de noter à l’actif de la diplomatie togolaise l’absence de telles ambitions pour des raisons de sa philosophie de la paix. Mais une telle posture n’exclut pas dans la stratégie togolaise l’idée d’intérêts, car sa propre survie également en dépend.
Vu son niveau d’influence et son omniprésence dans les questions internationales, la diplomatie togolaise ne s’empêche guère de s’afficher comme un pays qui aspire à plus d’autonomie et de souveraineté, tout comme d’autres pays africains actuels tels que le Mali, le Burkina-Faso et la Guinée. Ce vent qui souffle en ce moment sur l’Afrique ne laisse la diplomatie togolaise en marge d’une telle donne géopolitique africaine. Ce qui justifie alors son choix de multipartenariat : d’où son entrée dans le Commonwealth.
Ce choix, il faut le noter, au regard de certaines puissances telles que la France, met en mal les intérêts de ces dernières en Afrique en général et au Togo en particulier. Certains analystes politiques pourraient même se permettre de démontrer que le Togo devient un acteur clé dans la dynamique même de l’intégration systématique de l’Afrique, qui est également un autre aspect de cette diplomatie qui devient de plus en plus intellectuellement offensive sur le plan international.
Le discours solennel du ministre des affaires étrangères et des Togolais de l’extérieur au sommet de l’ONU dernier, sonne ce que l’on peut appeler le glas de la fin de toute forme d’hégémonie occidentale dans le monde qui se reconstruit sous l’angle du nouvel ordre mondial avec pour idéologie principielle la multipolarité. Dans la logique d’un tel ordre, aucun peuple ne désire plus se faire conter l’histoire de l’humanité, du moins ne pas faire comme ce que Sarkozy disait à Dakar, pour avoir reproché à l’Afrique de n’être pas rentrée suffisamment dans l’histoire.
Dans cette optique, la diplomatie togolaise ne voudrait pas restée en marge d’une telle donne et dynamique : d’où le néologisme de l’Africanophonie qui fut au cœur du discours de l’ONU une résonance, augmentant ainsi dans une certaine mesure la notoriété de cette diplomatie qui se veut à la fois pragmatico-neutre et multipartenariale.
Qu’il s’agisse de la neutralité ou du multipartenariat, les arcanes d’une telle posture pourraient révéler une espèce de dispositions et de prédispositions tutélaires contre toute forme de foudre qui pourrait remettre la philosophie de paix, qui devient désormais la marque de fabrique de cette diplomatie. À la place des foudres, qui pourraient venir éventuellement de toutes parts, pour telle position ou telle autre sur le plan géopolitique international, le Togo s’attire plutôt la sympathie des pays comme la France. Qui pour se maintenir davantage dans une Afrique de plus en plus éveillée, une Afrique qui ne croit plus aux valeurs occidentales et qui aspire désormais à d’autres et belles expériences que n’a jamais connues son histoire.
L’on pourrait aisément émettre l’hypothèse de l’avènement du terrorisme aux portes du Togo, comme étant justifié par tous ses choix que le Togo opère sur le plan international. À l’heure de ce que nous pouvons appeler le Printemps africain, le Togo voudrait se présenter comme un acteur principal dans le processus de la libération totale de l’Afrique, avec le souci de la géostratégie et de la géoposition.
Qu’il s’agisse de la prudence dans le déploiement de l’action diplomatique, de la préservation des intérêts du peuple togolais, de la volonté de consolider les liens économiques avec le monde extérieur, la diplomatie togolaise peut aisément se vanter d’avoir une bonne lanterne pour éclairer celles et ceux qui ont besoin de son oscillement.
Atsou Ayefoumi